La crise dure....c'est dur.

Au bout de trente ans de vie commune, Catherine Leroy a trouvé la force de se
séparer d'un mari dont elle tait la violence. " J'ai passé trois mois chez mes parents,
quatre en foyer et je viens d'emménager avec ma fille dans un appartement meublé
grâce à une amie ", explique-t-elle, les larmes aux yeux. Travailler plus ? Cette
grand-mère de 49 ans, titulaire d'un CAP d'employée de bureau, en rêve. Mais les
associations d'aide à domicile ne lui trouvent rien de régulier. Quelques heures en
plus, qui lui coûtent cher en déplacement. Et elle vient d'écoper de 90 euros
d'amende pour ne pas avoir fait réparer sa voiture après un contrôle technique.
Ce n'est pas un emploi, mais l'argent qui manque à David Mortelette, 34 ans, pour
sortir du surendettement. " J'ai une belle qualification dans le bâtiment, mais le
salaire ne suit pas ", explique ce trentenaire qui travaille depuis qu'il a 14 ans.
Au début des années 2000, son patron se suicide. Resté six mois sans salaire, il se
résout à faire une demande de RMI, bricole et s'endette pour faire vivre sa femme et
ses deux fils. Un troisième garçon vient au monde. David Mortelette retrouve un job
de salarié, contracte un nouveau crédit. En accord avec son patron, il se fait licencier
pour se mettre à son compte. Les Assedic crient à la démission déguisée et refusent
de l'indemniser. La famille plonge un peu plus.
Aujourd'hui, le salaire de David est de 1 340 euros, sur lequel 900 euros sont
prélevés, en début de mois, pour payer les dettes et le loyer. " Depuis qu'il y a l'euro,
c'est très dur. Je dois encore 3 800 euros. C'est beaucoup. Même en faisant les
brocantes, je n'y arrive pas ", se désole-t-il. Sans le Secours catholique et ses
familles d'accueil bénévoles, ses enfants n'auraient jamais connu le plaisir de partir
en vacances.
" Évidemment, on pourrait divorcer, ma femme et moi. Ou faire de fausses
déclarations. Mais ce serait voler l'Etat. Ce n'est pas mon genre ", remarque David.
Songeur, il couve des yeux ses enfants qui jouent paisiblement sur le canapé du

séjour : " J'ai toujours travaillé. J'ai réussi à monter. Maintenant, je n'y crois plus. Je
ne suis jamais parti en vacances, même pas à Dunkerque. Partir quinze jours avec
mes trois garçons, serait-ce trop demander après vingt années de travail ? "

L'Europe riche et ses " working poors "
L'EUROPE des Quinze comptait, en 2001, un peu plus de 11 millions de
travailleurs pauvres - des personnes ayant travaillé au moins sept mois dans une
année et faisant partie d'un ménage qui dispose de moins de 60 % du revenu
médian national pour vivre. C'est ce que révèle dans son numéro de novembre le
mensuel du Centre d'études de l'emploi dans une des rares enquêtes consacrées à
ce sujet.
Cette forme de pauvreté touche davantage les Etats du sud de l'Europe (plus de 10
%) que ceux du nord (moins de 6 %). Avec un taux de 8 %, la France se situe un
point au-dessus de la moyenne européenne. Plus marquée chez les indépendants
que chez les salariés, la pauvreté des travailleurs dépend au premier chef des
caractéristiques de leur emploi (niveau de salaire, durée de travail et taux de
rémunération horaire). Ces caractéristiques varient beaucoup d'un pays à l'autre : au
Royaume-Uni et aux Pays-Bas, les bas salaires proviennent plus de l'emploi à temps
partiel, très répandu, en particulier chez les femmes, alors qu'en Espagne et en
Grèce, c'est surtout la faiblesse des salaires horaires qui est en cause.
Mais la structure du ménage compte aussi. En général, la bi-activité protège de la
pauvreté : le risque d'être pauvre n'est que de 6,6 % quand il y a deux revenus. Il
s'élève à 18,6 % dans les foyers où une seule personne a un emploi.
Les transferts sociaux (allocations chômage, familiales, etc.) jouent aussi un rôle
majeur. C'est le cas dans les pays scandinaves. En revanche, dans le sud de

l'Europe où la protection sociale s'est généralisée tardivement, les transferts sociaux
(hors retraites) restent d'un niveau très faible. En France, c'est grâce à ces
compléments de revenu que la proportion de travailleurs pauvres passe de 14 % à 8
%

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